À entendre malgré moi les singeries pré-électorables, et grâce à quelques expériences professionnelles aux côtés de faiseurs de beaux discours, j’ai subitement compris le secret de toute bonne campagne électorale, de toute demande de financements publics ou de toute justification de dépense de ces mêmes subventions. C’est très simple : il faut placer ou, mieux, replacer quelqu’un ou quelque chose « au centre du dispositif » (de préférence sans préciser quel dispositif, cela va de soi).
Démonstration :
- Commençons par l’exemple le plus facile : pour embellir la France de demain, chaque candidat à la présidentielle souhaite replacer le citoyen (ou le peuple) au centre du dispositif. Jolie tarte à la crème mais qui fonctionne, si l’on en croit la passion des médias pour les petits et les grands discours.
- Restons dans les enjeux électoraux : pour prévenir la délinquance, on place les maires ou les associations de proximité, voire même la médecine légale, au centre du dispositif. C’est selon.
- La lutte contre la toxicomanie exige, quant à elle, d’employer les grands moyens : Dame Justice elle-même se retrouve projetée au centre du dispositif.
- L’éducation, autre passion « citoyenne » : en Sciences de l’éducation, il est indispensable de replacer l’ « apprenant » au centre du dispositif. « Apprenant » qui devient… « discutant » pour « philosopher à l’école primaire » (tout un programme).
- De même, afin d’intégrer les élèves de ZEP à Sciences Po, on place « les équipes pédagogiques des lycées » au centre du dispositif. Mais de manière générale, il faut savoir que les politiques éducatives placent « la famille et l’enfant » au centre du dispositif.
- Quel rapport avec la cuisine, me direz-vous ? Sachez que dans le centre de formation d’Alain Ducasse, c’est le tutorat qui est placé au centre du dispositif, eh oui, Mesdames et Mesdames.
- Mais quid de la santé ? Dans ce domaine qui alimente régulièrement les débats, c’est évidemment le patient qui se trouve replacé au centre du dispositif. Sauf quand on veut passer de la pommade aux personnels soignants des hôpitaux, voire aux hôpitaux eux-mêmes : on les propulse illico presto au centre du dispositif. Là aussi, ça dépend du vent.
- Pour faire bonne figure, n’oublions surtout pas de mettre les personnes âgées, les personnes handicapées, les femmes et les chômeurs, ou plutôt le « projet personnalisé d’accès à l’emploi« , au centre du dispositif.
- A contrario, dans le monde de l’entreprise, on replace le salarié au centre du dispositif. Ou alors l’entrepreneur, c’est selon aussi.
- Mais laissons un peu de côté ces considérations sérieuses pour plonger dans la CCCulture (avec plusieurs C majuscule, s’iouplé). Saviez-vous que le mouvement dadaïste plaçait l’auditeur, déjà, au centre du dispositif ?
- En plus moderne, dans le domaine du droit de la communication appliqué à l’Internet, on place évidemment l’internaute au centre du dispositif, quand ce n’est pas l’hébergeur, le FAI ou le gestionnaire télécoms.
- Cela marche aussi pour la biodiversité, le plan canicule, le kanak, Paris et sa région, le vendeur, les objectifs ou, le mieux étant l’ennemi du bien, la personne, tout simplement.
Après « citoyen », ce nom commun improprement (peuchère) utilisé comme adjectif doucereux à la place du joli « civique », nous avons donc, dans l’arsenal des figures de rhétorique de ce début de siècle, « au centre du dispositif ».
Moi, je mettrais bien un Kenwood Chef au centre du dispositif : si un candidat me fait cette promesse alléchante, je prends la carte.
PS : J’ai des véritables cheveux de Britney Spears à vendre. 5000 dollars la mèche. Contactez-moi par email si vous êtes intéressés.
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Purée d’artichauts au cumin
J’ai trouvé l’idée de cette recette très savoureuse sur le blog ThymCitron1, dans l’interview gourmande de Nicolas Bergerault (L’Atelier des Chefs).
Adepte des recettes rapides et saines, pour les soirs de semaine à 200 à l’heure, j’ai sauté sur l’occasion. Résultat : cette purée est raffinée et délicieuse, surtout en accompagnement de poisson ou d’agneau.
- Faire cuire des fonds d’artichauts (frais ou surgelés, merci Picard) dans un bouillon de légumes.
- Quand ils sont cuits, les mixer avec de l’huile d’olive, du cumin en poudre, un peu de jus de citron, du sel et du poivre.
- Placer la purée au centre du dispositif.
- La déguster bien chaude.